⊹ tabula rasa
▷ j'ai été kidnappé quand j'avais cinq ans, par un homme qui s'appelle Victor. Victor est désormais en prison, mais je dois avouer que parfois, je le considère encore comme mon père. Il a prit soin de moi pendant toutes ses années, et au fond, j'ai du mal à lui en vouloir. ▷ j'aimerais revoir Victor, au moins une fois. ▷ j'adore les chats et les petits animaux, mais j'ai une peur bleue des chiens, même les petits. ▷ je ne sais pas nager, j'ai une peur bleue de l'eau, en fait. ▷ depuis qu'on m'a fait fumer au lycée, je commence à être accro à la nicotine, mais je n'ose pas l'avouer et je fume en cachette. Je crois qu'Ezeckiel le sait. ▷ je n'aime pas mes parents. je leur en veux énormément d'avoir abandonner les recherches pour moi, de m'avoir abandonner aussi vite. au bout de dix ans, j'aurais compris, mais pas au bout de trois. ▷ j'ai souvent besoin de parler de tout ce qu'il s'est passé, de comment je vivais avec Victor, de ma première fois avec lui, de nombreuses choses. Mais, mes parents ne supportent pas que j'en parle et ils ne veulent pas que je parle a Ezeckiel non plus. Alors je consulte une psychologue, elle m'aide beaucoup puisque je peux lui parler sans me sentir coincé. ▷ j'ai beaucoup de retard dans mes études, la preuve, je ne suis qu'en seconde et je galère totalement.

⊹ darkness from above
AIMEZ-VOUS VIVRE A KILLIN ? ▷ Killin.. C'est spécial. Il se passe des choses étranges. J'y vis depuis un an désormais, puisque je viens de fêter mes dix-sept ans. La ville est pas trop mal, un peu perdue au milieu de nul part mais bon, c'est potable. Y a de quoi s'amuser, au moins. Et puis, j'ai mon jumeau, c'est déjà ça. AVEZ-VOUS PEUR DE VIVRE ICI DEPUIS LES DERNIERS ÉVÉNEMENTS ? ▷ Absolument pas. Pourquoi aurais-je peur de vivre ici alors que j'ai vécu le pire pendant onze ans ? Non franchement. Je suis content d'avoir mon jumeau avec moi, parce qu'honnêtement, c'est le seul qui a toujours cru en moi. Pas eux. Eux, je les déteste, et Killin.. Killin peut être un nouveau départ pour moi. CROYEZ-VOUS AUX LÉGENDES ? ▷ Je crois qu'il se passe quelque chose d'étrange par ici. Quelque chose qui ne se passe pas dans les autres villes. Je crois aux légendes de la ville, car il faut l'avouer, cela donne un petit coup d'adrénaline quand on sort le soir. C'est amusant, intriguant, passionnant. J'aimerais bien parler aux "victimes" des légendes. Savoir ce qu'il se trame réellement.

⊹ legends never die
« Eh pss, gamin ? » Tranquillement assit sur la pelouse du jardin, Ciàn joue avec les chevaux en plastique que lui a acheté son père. Ezechiel n'est pas très loin, il est entrain de prendre son goûter alors le petit châtain ne s'inquiète pas. Il ne risque rien si son jumeau n'est pas très loin. Pourtant, la voix de cet homme se fait de plus en plus insistante. Fronçant les sourcils, le jeune garçon de cinq ans à peine soupire avant de gonfler les joues en tournant la tête vers l'homme. Il est juste à côté de lui, la vingtaine ou la trentaine certainement. « Tu me passe un cheval pour que je joue avec toi ? » Ciàn plisse les yeux avant de lui en tendre un, le trouvant un peu trop vieux pour jouer avec lui. Pourtant, les paroles que lui prononce l'homme à l'oreille le rassure, et il se met même à rire en jouant. Et il rit, il rit jusqu'à ce qu'il sente le mouchoir à l'odeur si particulière se poser sur son visage, et que tout devienne sombre autour. Et quelques heures plus tard, quand il reprit connaissance, ce fut une autre vie qui commença pour Ciàn. Finalement, ce ne fut pas si terrible que ça pour le jeune garçon. Lorsqu'il s'était réveillé ce jour là, dans ce petit lit d'enfant, dans cette chambre inconnue, tout lui avait semblé si étrange, si différent. Il s'était levé et il avait rejoint le salon, y trouvant l'homme qui jouait avec lui quelques heures plus tôt. Victor. Il avait rapidement retenu son prénom. Et il s'était habitué à cette vie. Cependant, Ezechiel lui manquait énormément.


« Quand c'est qui va venir me voir Zé ? Et m'man ? » Victor lui répondait toujours la même phrase, avec ce sourire froid et crispé. « Il viendra pas. Ils ne voulaient plus de toi, alors ils t'ont donné à moi chéri.. Tu le sais pourtant. Ils ne voulaient qu'un seul enfant.. Ils ne voulaient pas de toi, mais moi oui.. » Alors Ciàn se taisait et recommençait à jouer avec ce petit sourire enfantin, qui cachait son énorme tristesse. Oh, Victor s'occupait bien de lui. Il lui faisait l'école à la maison, lui apprenant tout ce qu'il avait besoin de savoir. Il prenait soin de lui, le chouchoutait comme le ferait un père veuf à son unique enfant. Il était gâté, mais il ne pouvait jamais sortir de chez lui. Pas une seule fois il ne pu aller dans le jardin, ou alors sous la surveillance de Victor quand ce dernier était avec lui. Il était couvert de cadeaux, mais son cœur était toujours aussi vide. Vide jusqu'à la veille de ses seize ans. Il était grand maintenant, Ciàn. Victor était toujours aussi gentil avec lui, mais l'adolescent en avait marre d'être enfermé. Il voulait sortir, voir le monde. Se faire des amis. Combler ce vide dans son cœur. Alors, il lui vint pour la première fois une idée. Pourquoi il ne partirait pas de lui même ? Il pouvait faire son sac à dos, puis partir en douce et s'enfuir. Le faire la nuit ? Non, parfois Victor le rejoignait dans la nuit, ça risquait de mal se passer. Son père adoptif, comme il l'appelait, avait déjà couché avec lui deux ou trois fois. Ciàn ne se souvenait plus. C'était douloureux la première fois, puis il ne sentait presque plus rien après. Mais lorsque le châtain avait dit à son aîné que ça ne lui plaisait pas, il avait subitement arrêté. Et maintenant, Ciàn était tranquille, sauf quand Victor le rejoignait pour dormir. Bon sang, ce qu'il déteste dormir avec quelqu'un. Le jour de ses seize ans, Ciàn mit son sac sur son dos après avoir enfiler son manteau. Son père adoptif était aux toilettes. Prenant son courage à deux mains, Ciàn déposa le mot sur la table, puis sorti en douce par la fenêtre et se mit à courir. Bon sang. Il n'avait jamais couru aussi vite. L'adrénaline alimentait ses poumons tandis qu'il dévalait les pentes à toute allure, regardant de temps en temps derrière lui. Il n'était pas suivit. Il avait réussit. Bon sang, il avait réussit.


En onze ans de séquestration, il était impossible pour le châtain de reprendre le chemin de chez lui. Il avait tout oublié. Alors il s'était dirigé vers le poste de police le plus proche, encore tout tremblant de sa réussite. A chaque passant, chaque voiture, il avait peur de retrouver Victor. Pourtant, il était entré dans ce poste de police, à deux doigts de s'évanouir à cause de cette peur constante. Il s'était appuyé contre le mur et avait fermé fort les yeux en attendant qu'on vienne lui parler. Et malgré sa gorge nouée, il avait tout dit à la police, tout. Sa séquestration, ce qu'il se souvenait de son enlèvement, son nom, le prénom et le nom de famille de Victor, il leur avait dit qu'il avait un frère jumeau, un faux jumeau mais qu'il ne se souvenait pas de son vrai nom de famille. Et à peine douze heures après, il vit cette femme franchir la porte du commissariat. Sa mère ? Oui, à la manière dont elle l'avait serré dans ses bras, c'était sa mère. Pourtant, il ne se souvenait pas de son visage. Ou.. très vaguement. Mais il s'était laissé faire. Elle lui avait dit qu'Ezechiel l'attendait chez eux avec Franck, son vrai père. C'était son jumeau, Ezechiel ? Zé ? Sans doute. Après un faible sourire aux autorités, il était rentré chez lui. Il savait que ce n'était pas terminé. Il savait qu'ils allaient emprisonner Victor, et que pour ça, il devait faire des examens, passer devant la coure. Mais ce serait pour une autre fois. Il fallut une année pour que tout soit terminé. Voilà maintenant deux semaines qu'ils ont emménage à Killin. C'est différent d'Edimbourg, mais c'est joli. Victor est en prison maintenant, et il ne touchera plus aucun enfant. Au fond, Ciàn éprouve énormément de peine pour lui. Le jeune homme à reprit l'école. C'est difficile, mais il sait que Ezechiel est là pour l'aider, même si il a énormément de mal à le reconnaître comme son frère. Il voit cette famille comme des étrangers, mais au moins, il peut vivre, malgré cet horrible sentiment de mal être. Comme si il était, finalement, le vrai vilain petit canard.

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